Date : 20150327
Dossier : IMM-6676-13
Citation : 2015 CF 396
[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]
Toronto (Ontario), le 27 mars 2015
En présence de madame la juge Simpson
ENTRE : |
RICHARD MANOO |
demandeur |
et |
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION |
défendeur |
JUGEMENT ET MOTIFS
[1] Richard Manoo [le demandeur] demande le contrôle judiciaire, conformément au paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR], de la décision datée du 23 septembre 2013 par laquelle un agent des visas au haut‑commissariat du Canada à Port of Spain, à Trinité, [l’agent] a refusé de lui donner l’autorisation de revenir au Canada, aux termes du paragraphe 52(1) de la LIPR [la décision].
I. Contexte
[2] Le demandeur est un citoyen et résident de Trinité‑et‑Tobago âgé de 65 ans. Sa femme est décédée en 1985. Sa mère de 102 ans est citoyenne canadienne. Le demandeur a également sept frères et sœurs, qui demeurent tous à Toronto ou aux alentours.
[3] Le demandeur est d’abord entré au Canada le 18 septembre 2002. Il a alors présenté une demande d’asile dans laquelle il alléguait être persécuté aux mains de criminels à Trinité‑et‑Tobago. Une mesure de renvoi conditionnelle a été prise à son arrivée. Sa demande d’asile a été rejetée le 14 juin 2004.
[4] Le demandeur a ensuite présenté une demande d’examen des risques avant renvoi [ERAR] le 13 avril 2006, laquelle a été rejetée par la suite, de sorte que la mesure de renvoi conditionnelle est devenue exécutoire le 5 janvier 2007.
[5] Le 10 mars 2007, le demandeur a été arrêté et mis en détention. Le 14 mars 2007, il a été expulsé à Trinité. Il a par la suite remboursé le coût de son expulsion au gouvernement du Canada.
[6] Le demandeur avait présenté une demande de résidence permanente fondée sur des motifs d’ordre humanitaire avant d’être expulsé. Le 18 juin 2012, il a appris que sa demande avait été rejetée.
[7] En février 2008, le demandeur a présenté une demande de visa de résident temporaire afin de pouvoir visiter sa famille au Canada. Cette demande a été rejetée.
[8] Plusieurs années plus tard, la sœur du demandeur a retenu les services d’un avocat afin qu’il prépare une demande de visa pour entrées multiples pour le demandeur. D’après lui, la demande a été présentée au bureau des visas du Canada à Trinité en décembre 2012. Toutefois, selon le paragraphe 52(1) de la LIPR, le demandeur devait aussi demander une autorisation de revenir au Canada [la demande d’ARC]. Cette demande a été présentée le 20 juin 2013.
II. La décision
[9] La demande d’ARC a été rejetée pour les motifs suivants :
[traduction] ÉVALUATION : DEMANDEUR – EST ENTRÉ AU CANADA COMME VISITEUR ET Y EST DEMEURÉ SANS AUTORISATION – MESURE D’EXPULSION PRISE CONTRE LUI MAIS NE S’EST PAS PRÉSENTÉ POUR SON RENVOI – A FAIT L’OBJET D’UN MANDAT D’ARRESTATION NATIONAL, A ÉTÉ ARRÊTÉ ET MIS EN DÉTENTION – RENVOYÉ DU CANADA AUX FRAIS DE L’ÉTAT. BUT DU VOYAGE : VISITER LA FAMILLE. VISA DE VOYAGEUR DÉJÀ REFUSÉ. LE RISQUE POSÉ À LA SOCIÉTÉ CANADIENNE PAR LE DEMANDEUR N’EST PAS ÉLEVÉ, D’APRÈS SES ANTÉCÉDENTS. IL A MANIPULÉ LE SYSTÈME D’IMMIGRATION DE FAÇON ÉHONTÉE POUR DEMEURER COMME RÉSIDENT PERMANENT AU CANADA MÊME S’IL N’AVAIT PAS OBTENU CE STATUT. IL N’A PAS COLLABORÉ AVEC LES AUTORITÉS DE L’IMMIGRATION AU CANADA. IL A ÉTÉ RENVOYÉ AUX FRAIS DE L’ÉTAT ET A REMBOURSÉ LES COÛTS DE L’EXPULSION. LES FACTEURS DÉFAVORABLES L’EMPORTENT SUR LES FACTEURS FAVORABLES DANS LA PRÉSENTE DEMANDE, DE SORTE QUE LA DEMANDE D’ARC EST REJETÉE.
[Non souligné dans l’original.]
III. Question en litige
[10] La question est la suivante : La décision est‑elle raisonnable?
IV. Analyse
[11] À mon avis, la décision est déraisonnable parce que l’agent s’est fondé sur les erreurs factuelles décrites ci‑dessous :
• La déclaration de l’agent selon laquelle le demandeur est [traduction] « entré au Canada comme visiteur et y est demeuré sans autorisation » est inexacte. En réalité, il est demeuré au Canada à titre de demandeur d’asile et de demandeur d’ERAR.
• La déclaration de l’agent selon laquelle le demandeur [traduction] « a manipulé le système d’immigration de façon éhontée » est également inexacte. Ce que le demandeur a fait, c’est présenter une demande d’asile, une demande d’ERAR et une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire, ce que le droit canadien lui permettait de faire.
[12] La décision est aussi déraisonnable parce que l’énoncé [traduction] « but du voyage : visiter la famille » minimise l’importance du voyage du demandeur. La demande d’ARC présentée par le demandeur montre qu’il voulait visiter des membres de sa famille, notamment sa mère malade, une sœur qui avait eu un accident vasculaire cérébral, une nièce en fauteuil roulant et un frère qui avait eu un accident de voiture.
V. Certification
[13] Aucune question n’a été proposée aux fins de certification.
JUGEMENT
LA COUR STATUE :
1. La demande est accueillie.
2. La décision est annulée et l’affaire doit être réexaminée par un autre agent.
3. Le demandeur peut déposer de nouveaux documents aux fins du réexamen et une nouvelle demande de visa de visiteur.
« Sandra J. Simpson »
Juge
Traduction certifiée conforme
Johanne Brassard, trad. a.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : |
IMM-6676-13
|
INTITULÉ : |
RICHARD MANOO c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
|
LIEU DE L’AUDIENCE : |
Toronto (Ontario)
|
DATE DE L’AUDIENCE : |
LE 25 MARS 2015
|
JUGEMENT ET MOTIFS : |
LA JUGE SIMPSON
|
DATE DES MOTIFS : |
LE 27 MARS 2015
|
COMPARUTIONS :
Roger Rowe
|
POUR Le demandeur
|
Ada Mok
|
POUR LE DÉFENDEUR
|
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Law Offices of Roger Rowe Avocat Toronto (Ontario)
|
POUR Le demandeur
|
William F. Pentney Sous‑procureur général du Canada Ottawa (Ontario)
|
POUR LE DÉFENDEUR
|