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Date : 20141224


Dossier : IMM-8031-14

Référence : 2014 CF 1256

Ottawa (Ontario), le 24 décembre 2014

En présence de monsieur le juge Annis

ENTRE :

KOUADIO MATHURIN YAO

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

défendeur

ORDONNANCE ET MOTIFS

I.                   Introduction

[1]               Il s’agit d’une requête déposée par le demandeur en date du 3 décembre 2014 visant à obtenir le sursis de l’exécution d’une mesure de renvoi prévu pour le 11 décembre 2014 vers la Côte d’Ivoire jusqu’à ce qu’une décision soit prise au fond sur sa demande d’autorisation et de contrôle judiciaire du refus de différer le renvoi et, subsidiairement, jusqu’à ce qu’une décision soit prise sur sa demande de résidence permanente [DRP] à titre de membre de la famille d’une personne ayant le statut de réfugié.

[2]               En date du 10 décembre 2014, la requête en sursis du demandeur a été acceptée avec motifs à suivre. La présente constitue les motifs de cette décision.

II.                Les faits

[3]               Le demandeur est citoyen de la Côte d’Ivoire. Il est marié à Mme Eva Marie Pierre Yao Bayi et le couple a trois enfants.

[4]               Le demandeur a séjourné au Canada du 5 juillet 2008 au 20 septembre 2009 et il a, à cette occasion, travaillé sous le statut de représentant étranger au Canada.

[5]               Le 16 octobre 2008, Mme Bayi ainsi que les trois enfants rejoignent le demandeur au Canada. Le 9 juillet 2009, le demandeur et son épouse se séparent et en date du 5 août 2009, Mme Bayi dépose une demande d’asile en son nom et au nom des trois enfants sur la base de la crainte de son mari et de la famille de celui-ci si elle devait rentrer en Côte d’Ivoire.

[6]               Après être retourné en Côte d’Ivoire, le demandeur revient au Canada le 9 décembre 2009 pour déposer une demande de permis de travail et cette demande est refusée en mai 2010, puisque le demandeur n’avait plus le statut de représentant étranger depuis le 1er octobre 2009.

[7]               En août 2010, le demandeur revendique le statut de réfugié sur la base de ses opinions politiques et de son appartenance à l’ethnie Baoulé de la Côte d’Ivoire.

[8]               Le 19 avril 2011,  la Section de la protection des réfugiés [SPR] reconnaît à Mme Bayi, ainsi qu’aux trois enfants, le statut de réfugié au sens de la Convention. Ainsi, le 1er août 2011, Mme Bayi dépose une DRP en tant que personne protégée auprès de Citoyenneté et Immigration Canada [CIC] qui lui attribue le numéro d’identification personnel suivant : 60600589.

[9]               Le 6 mars 2012, CIC fait parvenir une lettre à Mme Bayi, lui indiquant qu’elle et ses enfants répondent aux conditions d’admissibilité au statut de résident permanent en tant que personne protégée mais que des renseignements supplémentaires sont nécessaires pour compléter sa demande. La lettre précise de même que la demande visant à inclure les personnes à sa charge vivant à l’extérieur du Canada ne peut être traitée puisque Mme Bayi n’a déposé que 1 000$ alors que le montant devant être reçu est de 1 550$.

[10]           Le 12 mars 2012, la SPR rejette la demande d’asile du demandeur et le 13 décembre 2012, la demande de contrôle judiciaire de cette décision par le demandeur est rejetée par la Cour.

[11]           Le 30 avril 2012, le demandeur complète le formulaire IMM 0008 afin de présenter une DRP. Ce formulaire prévoit que le demandeur a présenté sa DRP dans la catégorie de « Membre de la famille de personne ayant la qualité de réfugié au sens [de la] convention ».

[12]           Le 9 octobre 2012, CIC fait parvenir une lettre au demandeur par laquelle elle lui indique que sa DRP « dans la catégorie époux ou conjoint de fait au Canada » est incomplète, notamment en ce que ce dernier a joint un montant de 550$ alors que le montant total requis est de 1 000$. Le numéro d’identification personnel du demandeur auprès de CIC est le 60208085.

[13]           En date du 9 novembre 2012 et du 12 novembre 2012, le demandeur fait parvenir à CIC deux lettres par le biais de son procureur, Me Sangaré Salif, visant à clarifier la situation. Par ces lettres, le demandeur demande à CIC de joindre les demandes 60600589 et 60208085, explique que les frais de traitement qu’il a payés au montant de 550$ complètent les frais de traitement de la DRP de Mme Bayi et fournis les documents manquants à son dossier.

[14]           Le 14 janvier 2013, CIC fait parvenir une lettre à Mme Bayi réitérant que sa demande visant à inclure les personnes à sa charge vivant à l’extérieur du Canada ne pouvait être traitée puisque cette dernière n’avait déposé que 1 000$ et que le montant devant être reçu était de 1 500$ et lui demandant de fournir les coordonnées de ces personnes. Puis, le 17 janvier 2013, CIC fait parvenir une lettre à Mme Bayi lui indiquant avoir reçu sa correspondance du 22 novembre 2012 et l’avisant que son dossier a été transféré au Centre d’immigration Canada de Ottawa pour la prise d’une décision. Cette lettre ne fait pas mention de renseignements ou frais manquants quant aux personnes à sa charge et vivant à l’extérieur du Canada. La correspondance du 22 novembre 2012 n’a pas été produite au dossier au soutien de la requête en sursis.

[15]           Par la suite, le demandeur soumet une demande d’évaluation des risques avant renvoi qui est rejetée le 28 mai 2014. Le demandeur a déposé une demande de contrôle judiciaire qui est toujours en suspens devant la Cour, mais qui n’est pas reliée à la présente requête en sursis.

[16]           En date du 26 novembre 2014, le demandeur transmet à CIC une demande de surseoir à son renvoi jusqu’à ce qu’une décision soit rendue sur une DRP parrainée par son épouse et à titre de membre de la famille, laquelle serait en cours de traitement selon le demandeur. L’agent de renvoi examine le dossier du demandeur et, le 3 décembre 2014, refuse de différer le renvoi du demandeur sur la base de l’absence de preuve de l’inclusion du demandeur dans la DRP de son épouse. Cette décision fait présentement l’objet d’un contrôle judiciaire devant la Cour et concerne la présente requête en sursis.

III.             Analyse

[17]           Le présent dossier comporte plusieurs irrégularités, dont les principales sont mises en lumière ci-dessous.

[18]           D’abord, selon l’affidavit du demandeur, Mme Bayi n’aurait pas inclus ce dernier à titre d’époux à sa DRP lorsqu’elle a soumis sa demande initiale, soit le 1er août 2011, mais l’aurait plutôt ajouté en avril 2012. Or, il est indiqué au formulaire IMM 5202 de Mme Bayi daté du 1er août 2011 que ses trois enfants sont inclus au titre des membres de la famille au Canada et que le demandeur est inclus à titre de membre de la famille hors du Canada et que tous sont visés par la DRP. En outre, la section C « Membres de votre famille hors du Canada », de ce formulaire présente des signes d’altérations. En effet, il semble que des données y ayant auparavant figuré aient été effacées et que le nom du demandeur ait été subséquemment ajouté.

[19]           De plus, le formulaire IMM 0008, soit la DRP du demandeur daté du 30 avril 2012 a été entièrement complété de façon électronique, à l’exception de deux cases du formulaire dans la section « Détails de la demande », soit la case « Programme au titre duquel vous présentez votre demande » et la case « Catégorie au titre sous laquelle vous présentez votre demande », auxquelles le demandeur a respectivement inscrit « Autre » et « Membre de la famille de personne ayant la qualité de réfugié au sens [de la] convention ». Or, en date du 9 octobre 2012, CIC correspond avec le demandeur et inscrit à sa lettre que le demandeur a soumis une DRP « dans la catégorie époux ou conjoints de fait au Canada ». La Cour note que l’information figurant au formulaire du demandeur à la case concernant la catégorie à laquelle il a soumis sa DRP semble avoir été modifiée.

IV.             Conclusion

[20]           Pour ces raisons, la Cour conclu que les documents soumis au soutien de la présente requête semblent avoir été altérés.

[21]           Dans son ordonnance du 10 décembre 2014, la Cour a accordé un sursis de 60 jours au demandeur afin de permettre à ce dernier de produire les documents nécessaires afin de régulariser sa situation. À ce moment, la Cour ne disposait pas des représentations supplémentaires du défendeur qui ont mis en lumière les faits explicités dans la présente.

[22]           La Cour est en devoir de maintenir son ordonnance rendue en date du 10 décembre 2014 accordant le sursis au demandeur. Cependant, les présents motifs permettent de bien comprendre l’évolution du dossier du demandeur et faciliteront la tâche dans les prochaines décisions qui devront être prises dans ce dossier.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la demande de sursis est accordée pour une période de soixante jours ayant débuté en date de l’ordonnance du 10 décembre 2014.

« Peter Annis »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-8031-14

 

INTITULÉ :

KOUADIO MATHURIN YAO c LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 9 décembre 2014

 

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LE JUGE ANNIS

 

DATE DES MOTIFS :

LE 24 décembre 2014

 

COMPARUTIONS :

Me Salif Sangaré

 

pour le demandeur

 

Me Isabelle Brochu

 

pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Salif Sangaré

Montréal (Québec)

 

pour le demandeur

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

 

pour le défendeur

 

 

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