Date : 20141216
Dossier : IMM-1203-14
Référence : 2014 CF 1223
[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]
Ottawa (Ontario), le 16 décembre 2014
En présence de monsieur le juge O’Reilly
ENTRE : |
ABBAS GHOLAMI, FATEMEH NASERIAN MOCHADAM, ALI GHOLAMI, BATOUL GHOLAMI, HOURA GHOLAMI, MOHAMAD GHOLAMI ET HOSSEIN GHOLAMI |
demandeurs |
et |
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DU MULTICULTURALISME |
défendeur |
JUGEMENT ET MOTIFS
I. Aperçu
[1] Les demandeurs sollicitent l’asile au Canada, et ils se fondent principalement sur la demande de M. Abbas Gholami. Ils sont des citoyens de l’Iran, mais ils détiennent des permis de résidents permanents au Koweït. En fait, ils n’ont jamais été en Iran. Leurs permis de résidents du Koweït sont maintenant expirés.
[2] Les demandeurs déclarent que lorsqu’ils étaient au Koweït, ils ont reçu des messages de menace qui les ont menés à avoir une crainte de persécution en Iran. En particulier, ils craignent la famille arabe de l’épouse de M. Gholami en Iran, laquelle s’oppose au mariage de leur fille à M. Gholami qui est Persan. Ils craignent aussi d’être perçus comme étant des Arabes en Iran, étant donné qu’ils ont passé toutes leurs vies dans l’État arabe du Koweït et qu’ils ont donc souffert de persécution.
[3] Un tribunal de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a rejeté la demande d’asile présentée par la famille au Canada. La Commission a conclu qu’il n’y avait pas de preuve crédible que les demandeurs seraient exposés à la persécution en Iran. Bien que certains membres de la famille aient pu s’opposer au mariage, ce dernier a eu lieu en 1995 et, selon la Commission, il est peu vraisemblable que la menace continue aujourd’hui. De plus, bien que les Arabes soient exposés à la discrimination en Iran, la Commission a conclu que les demandeurs seront vraisemblablement perçus comme étant des Persans, étant donné que, M. Gholami, le chef de la famille est Persan. En outre, la famille ne serait pas exposée à la persécution religieuse parce qu’ils sont Chiites, et que les Chiites composent la grande majorité de la population en Iran. Enfin, la Commission a conclu qu’en tant que demandeurs d’asile déboutés, les demandeurs pourraient être interrogés à leur renvoi en Iran, mais qu’ils ne seront vraisemblablement pas exposés à la persécution pour ce motif.
[4] Les demandeurs contestent plusieurs des conclusions, mais leur argument principal est que la décision de la Commission était déraisonnable, parce que celle‑ci n’a pas examiné l’allégation qu’ils se sont auto‑identifiés comme étant des Arabes, même si techniquement M. Gholami est ethniquement un Persan, en raison de la filiation à son père. Au Koweït, ils parlaient, travaillaient et fréquentaient l’école en arabe. Ils ont toujours vécu dans une société arabe. Ils maintiennent que s’ils étaient obligés de vivre en Iran, ils seraient persécutés dans le pays parce qu’ils seraient perçus comme étant des Arabes.
[5] Les demandeurs demandent à la Cour d’infirmer la décision de la Commission, et d’ordonner qu’un autre tribunal réexamine leurs demandes.
[6] La Cour convient avec les demandeurs que la décision de la Commission était déraisonnable. Selon la Cour, la Commission n’a pas accordé d’attention adéquate à l’essence même de la demande d’asile des demandeurs – leur crainte de persécution en Iran en raison de leur origine ethnique arabe. La Cour doit donc accueillir la présente demande de contrôle judiciaire, et ordonner un réexamen des demandes des demandeurs.
[7] La seule question en litige est de savoir si la décision de la Commission était déraisonnable.
A. La décision de la Commission était-elle déraisonnable?
[8] L’argument principal des demandeurs est que la Commission n’a pas pris en compte un aspect essentiel de leur demande, à savoir, qu’ils seraient vraisemblablement exposés à la persécution en Iran parce qu’ils seraient perçus comme étant des Arabes. Selon eux, ce manquement a rendu la décision de la Commission déraisonnable.
[9] La Cour est d’accord.
[10] La Commission a clairement reconnu que les Arabes sont exposés à une discrimination très répandue en Iran. Cette conclusion est bien étayée par la preuve documentaire.
[11] Toutefois, lorsque la Commission a décidé que les demandeurs n’étaient pas des Arabes, elle s’est uniquement fondée sur le fait que le père de M. Gholami est Persan. Par conséquent, selon la Commission, M. Gholami est Persan, et le reste de la famille devrait aussi être perçu comme étant Persan.
[12] Selon la Cour, la Commission n’a pas admis qu’en Iran les demandeurs seraient vraisemblablement perçus comme étant des Arabes, étant donné leur langue, leur éducation et leurs antécédents familiaux au Koweït. En conséquence, la Commission n’a pas pris en compte un élément important des demandes d’asile des demandeurs.
[13] Par conséquent, la Cour conclut que la décision de la Commission ne constitue pas une issue défendable fondée sur les faits et le droit.
II. Dispositif
[14] La Commission a négligé un aspect essentiel des demandes d’asile des demandeurs. Par conséquent, sa conclusion selon laquelle les demandes d’asile des demandeurs devraient être rejetées était déraisonnable. Ainsi, la Cour doit accueillir la présente demande de contrôle judiciaire et ordonner qu’un tribunal de la Commission différemment constitué réexamine les demandes des demandeurs. Aucune partie n’a proposé une question de portée générale à certifier et aucune n’est énoncée.
JUGEMENT
LA COUR STATUE que :
1. La demande de contrôle judiciaire est accueillie. L’affaire est renvoyée à un tribunal de la Commission différemment constitué pour qu’il tienne une nouvelle audience.
2. Aucune question de portée générale n’est énoncée.
« James W. O’Reilly »
Juge
Traduction certifiée conforme
L. Endale
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : |
IMM-1203-14
|
INTITULÉ : |
ABBAS GHOLAMI, FATEMEH NASERIAN MOCHADAM, ALI GHOLAMI, BATOUL GHOLAMI, HOURA GHOLAMI, MOHAMAD GHOLAMI ET HOSSEIN GHOLAMI c MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DU MULTICULTURALISME
|
LIEU DE L’AUDIENCE : |
HALIFAX (NOUVELLE-ÉCOSSE)
|
DATE DE L’AUDIENCE : |
Le 10 septembre 2014
|
JUGEMENT ET MOTIFS : |
LE JUGE O’REILLY
|
DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS : |
LE 15 DÉCEMBRE 2014
|
COMPARUTIONS :
Lee Cohen, c.r. Scott McGirr
|
POUR LES DEMANDEURS
|
Patricia MacPhee
|
POUR LE DÉFENDEUR
|
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Lee Cohen Law Inc. Avocats Halifax (Nouvelle-Écosse)
|
POUR LES DEMANDEURS
|
William F. Pentney Sous-procureur général du Canada Halifax (Nouvelle-Écosse)
|
POUR LE DÉFENDEUR
|